27 mars 2007

Parvati valley - Manikaran

En milieu de matinée, je descends du bus de nuit et prends un autre bus local pour atteindre la Parvati valley. Ma 1ère idée est de me rendre à Khirganga, tout au bout de la route, à environ 3000 mètres d'altitude. J'apprends que ce ne sera pas possible car il y a 1m50 de neige qui recouvre le hameau et a même détruit des dhabas (petite échoppe à chai). Je verrais bien ce que je ferais ensuite. Pour l'heure, je monte dans un bus qui me mène jusqu'à Manikaran, lieu saint avec sources d'eau chaude... C'est déjà ça...

Je passe tout le trajet à roupiller sur la banquette recouverte de molesquine. Je suis totalement groggy lorsque j'arrive à destination. L'autrichien descend aussi. Vue sur ce superbe temple, au toit blanc qui pointe vers le ciel.



Un pont surplombant la Parvati sacrée rejoint les rives. Le village longe la rivière, s'étirant en longueur et se constitue de bicoques en bois et de maisonettes en dur. De petites ruelles, pleines d'échoppes aux breloques, mènent à la place du village, puis au temple. Sur le chemin, 2 saddhus nous arrêtent. L'autrichien leur demande quelque chose en hindi que je ne comprends pas et me retrouve à suivre les saddhus pour boire un chai. Il faut déjà les voir avec leurs dreads énormes, enroulées sur la tête et soutenues par une écharpe. Le regard est direct et défoncé, fumer le shilom étant l'une de leur principale activité, tel Shiva l'eût fait. "Un don des Dieux". Catapultée au chai shop, j'écoute l'autrichien et les saddhus philosopher. A nouveau, je sens mon côté spirituel inexistant et me trouve quelque peu décalée ici. Cela doit être dû à la fatigue.

Le saddhu qui parle le mieux en anglais se met à chanter, pour son Lord Shiva. Je reçois un Mala, collier de prières en perles. Il semblerait que j'aie un bon karma, comme celui d'une toute jeune fille (est-ce que ça veut dire que mon chemin sera long et mes réincarnations nombreuses???), sa fille. Soit. Pas très rassurant puisqu'il répète sans cesse être un homme fou... Certainement... Il détonne un peu.

Je prends enfin une chambre après cette arrivée rocambolesque dans ce nouveau lieu. Je ressors afin d'explorer les environs, le temple d'abord, si plein de vie avec ces belles couleurs qui flottent. De la fumée s'échappe en certains points de la rivière : ce sont les sources d'eau chaude. Ceux qui viennent prier au temple, déposent en même temps dans des pools, un balluchon contenant du riz, cuisant le temps des prières! Ce sont autant de lieux saints. Quel must de cuisiner et manger grâce à l'eau sacrée!




Je continue mon chemin et me pose là où je croise la femme qui tient le chaishop des saddhus. Elle contemple la vallée en fumant un biddi. Les femmes sont plus libérées par les montagnes. Nous parlons, écoutons le silence, relatif, la rivière dévalant non loin. Son rugissement ne parvient toutefois pas à cacher le chant des oiseaux. La Madame part aux morilles. Je ne la suis pas, étant bien trop fatiguée pour ce faire. J'erre un moment dans les rues, soupe et rentre me coucher, il est 7 heures du soir!

Le lendemain matin, je me sens un peu moins décalée, sauf au niveau du look peut-être, mes nouvelles lunettes ayant un petit air venant de la "City". Je me rends au chaishop, la priorité suite au réveil. Je me réchauffe les jambes à côté d'une sorte de wok contenant des cendres, déposées à l'instant par la Madame, qui semble me prendre en sympathie. C'est plus qu'agréable par cette fraîche matinée. Nous discutons le temps d'un biddi. Aujourd'hui, je compte descendre jusqu'à Kasol par le sentier que j'ai découvert hier. Il longe la rivière agréablement, je me croirais presque en Suisse : même fond d'air frais, sapins et pics enneigés.






Un chemin idéal, en pente douce abrité d'arbres aux troncs longs. Ca bourgeonne de partout, des éclats rosés, pourpres ou blancs pour les fleurs. Les feuilles, quand à elles, se disputent le vert le plus éclatant, alors que certaines osent les orangés. C'est de toute beauté, je me sens bien et me dis que j'ai de la chance.
Je fais une pause et me vois suprise par une lignée d'aigles, plânant à 7 mètres au-dessus de ma tête, en file indienne. Ailes déployées, ils ont une probable envergure d'un mètre ou peut-être davantage. Le ventre est blanc, semble doux et s'étire jusqu'au bout de la queue et des ailes, qui s'ourlent enfin de brun. Ce n'est que grâce, aisance et beauté!







Je croise enfin le pont qui me fera rejoindre Kasol.
Là, une masse se déplace jusqu'à moi, à la façon de Gollum et dépose un bout de carton à ses pieds. Vêtue de noir, en pièce raccomodée, le pull pendouille. Les cheveux sont châtains et presque rasés, enfin, on ne sait pas trop. La peau est brunie peut-être par le soleil mais surtout par la crasse. Puis la femme, une américaine, s'en est une, me regarde et me demande de l'argent, 500 roupies, une somme énorme ici. Je veux lui proposer à manger ce qu'elle refuse, elle veut de l'argent et me le répète, ce sont les seules choses qu'elle dit pratiquement. Sympathique. Elle me laisse une étrange sensation lorsque je la quitte. J'essaie d'imaginer sa vie, pourquoi elle en est arrivée là. Je suis troublée dans mes réflexions quelques instants plus tard lorsque la même femme hurle sur un groupe de gens, passant par là (et n'ayant pas voulu non plus lui donner de l'argent?!). C'est triste.

Je découvre Kasol et m'en vais manger dans un restaurant, semblant être the place to be, accueillant le blanc, fumant du charas en contemplant la vue. 3 indiens à l'air inspiré sont assis non loin. Ils font tous faces au panorama, ils le décrivent en anglais, avec leur typique indian accent, qui a le don de m'amuser, m'attendrir. L'un d'eux, le plus excentrique, s'est enroulé un turban autour de la tête et porte des lunettes de soleil "de la ville". Il chante des ragas qui ont, heureusement remplacés les chansons des Beattles (pas les meilleures) et ce serait encore mieux s'il ne chantait pas!

Je pense à la fin de ce voyage, il reste moins d'un mois maintenant, le compte-à-rebours à commencé. Le temps va passer encore plus vite. Les villages situés en amont que je pensais pouvoir visiter restent inatteignables. Je vais donc rester ici encore quelques jours. Dans mon hôtel il y a de l'eau chaude de la source. Une sorte de grande salle de bains constamment embuée, avec un bassin en son milieu, rempli de cette eau. Je ne parviens pas à m'y baigner, trop chaud! Mais quel bien de se rincer ainsi. Je n'ose plus compter depuis la dernière fois où j'ai eu de l'eau chaude à profusion!

Ce matin, avant de partir pour Kasol, je me suis rendue au chaishop. Vous l'aurez compris, beaucoup de choses se passent, se vivent là. J'y croise un enfant saddlhu, dreads longues et enroulées également dans un turban. Il vit avec son guruji, son maître. Il doit avoir 10 ans. Est-ce qu'il fume déjà???

Plus tard dans la journée, au même chaishop, je rencontre un anglais, aux dreads énormes, riant de toutes ces situations loufoques s'enchaînant depuis quelques instants. Il est attablé avec 2 indiens. Le plus vieux des 2, boit un chai, sort tous les biscuits de leur paquet, les pose sur la table, marmonne bizarrement, a l'air fêlé quoi. Je réalise alors subitement que tous les gens que j'ai rencontré jusqu'à présent (du moins ceux fréquentant ce chaishop) ont un air fou. Le 3ème gars assis à leur table n'a pas l'air méchant mais a de grands yeux exhorbités et fixants. Je ne sais pas ce que c'est exactement mais il y a quelque chose ici d'un peu follo : le croisement entre les cousins de la vallée, la fumette, le lieu saint font autant de facteurs pouvant attester de cette observation... Ca ne laisse pas mon esprit serein, si je peux m'exprimer ainsi et c'est loin d'être l'ambiance que je m'étais imaginée pour la fin de ce voyage. J'aurais aimé quelque chose d'un peu moins... torturé en quelque sorte...

J'hésite à aller rejoindre Nadja à Mcleod Ganj. La communauté bouddhiste est fortement implantée là-bas et l'ambiance sera peut-être moins ravagée?! Après une bonne nuit de sommeil, je décide de passer ma dernière journée à Manikaran avant de partir le lendemain matin pour Mcleod. Je suis un peu coupée dans mon élan, j'ai besoin de chaleur et n'aime décidément pas me réveiller en me ruant sur mes fringues et autres couvertures pour tenter d'en trouver, de la chaleur. Il aurait fallu que je me prépare à avoir froid... Il m'aura surprise, la saison est étrange ici aussi, en ayant fortement tardé à venir.

Et voilà qu'il m'arrive un truc bizarre ce matin. J'étais au chaishop, attendant ma commande lorsque je commence à me sentir mal. Je sors, me dirige vers une guest house à la recherche de toilettes, quand ma vue devient progressivement toute blanche, tous contrastes s'estompant inexorablement. Mon ouïe se trouble, j'entends tout au loin. Je finis par ne plus rien voir, titube et m'assieds, au milieu de la place. Je respire calmement puis tout revient gentiment, les couleurs, la rue. Après cette chute de pression, je me rue aux WC et me vide.
Je vais mieux après, continue ma journée et me persuade que c'est décidément une bonne idée de partir d'ici. Je me renseigne pour les bus et le trajet risque de me prendre la journée.

Je passe une nuit terrible, courant régulièrement aux toilettes, avec des crampes au ventre douloureuses. Je suis néanmoins réveillée à 6h et décide de partir coûte que coûte. Je dors ou somnole tout au long du trajet jusqu'à Bhuntar. De là, je prends un autre bus, en direction de Dharamsala (juste en-dessous de Mcleod Ganj), mais c'était juste en direction car après 6h de trajet, où j'ai resomnolé pour la plupart du temps, il m'a fallu prendre un 3ème bus pour 2 autres heures et encore un 4ème ensuite jusqu'à ma destination finale...
Si j'avais su...
Suis arrivée pathétiquement, ai pris une chambre, très mal localisée en bas d'un escalier que je peinerais à gravir les jours suivants pour joindre le village. J'ai dormi pendant 15 heures non-stop. Et là, a commencé la sérieuse chiasse, vous m'excuserez la si peu charmante expression : je pisse du cul.

J'arrive à me mouvoir jusque chez un docteur tibétain, qui m'a senti les pouls en me demandant confirmation concernant mes selles liquides. Il m'a ensuite donné des boulettes brunâtres et infâmes à avaler. Depuis, je tâche de me reposer bien que je continue à me vider. Je tente le jeûne pour que le poison s'en aille et finis par remanger du riz et des carottes en espérant que ça calme le jeu...
Je suis cloitrée (WC à proximité...) dans une chambre sans chauffage qui me glace les os alors que le soleil brille fort au-dehors. Je n'en peux plus, dès que mon corps le permet, je descends la vallée et prends un train pour Delhi. Mon état intestinal m'inquiète un peu. J''espère qu'il est dû à une bactérie attrapée en mangeant et non pas une tournure bizarre suite à mes staphylocoques. Mes plaies sont plus ou moins guéries mais peinent encore à cicatriser complètement.

Je peux à peine parler de Mcleod, puisque je n'ai pas eu la possibilié de quitter ma chambre souvent. Ca grouille de tibétains et de leur artisanat. Les femmes portent des chubas, ces robes se nouant dans le dos. L'ambiance est au buisness semblerait-il, comme partout une fois que l'on y repasse, quelques années plus tard : davantage de shops, de restos et d'hôtels. Les montagnes environnantes me rappellent celles de la Suisse, avec plus d'aigles qui plânent. Les touristes attirés ici sont d'un autre genre que ceux de la Parvati, aussi. En recherche spirituelle, prenant des cours de bouddhisme, langue ou cuisine tibétains, yoga, reiki, j'en passe et des meilleurs.

Après quelques jours dans ma chambre, il me semble aller mieux. Je pars donc pour Delhi. La route me bouscule en tous sens mais mon estomac tient le coup. J'ai l'impression, du moment que je bouge, l'esprit (de survie?) prend le dessus et le corps suit.

J'atteins Pathankot, un de ces trou de l'Inde qui peut avoir un air effrayant. On voit de telles personnages sur les quais des gares parfois... Des vieux à la barbe longue, vêtus de loongis oranges, autour de la taille, du buste, de la tête et un autre encore autour du cou. Ils marchent avec un bâton, ont un point rouge sur le front et des sandales parfois. L'un d'eux s'assied le long des rails, relève ses tissus et se soulage ainsi, accroupi devant tout le monde.
Il y a plusieurs vendeurs ambulants. Ils ont une sorte de carriole et dessus, un wok posé plein d'huile, où frient des mini-crêpes qui se mettent alors à gonfler, pour se revider enfin. Ils servent avec, dans les fameuses petites coupelles faites de feuilles séchées, différentes préparations de légumes ou pois chiches. Les gens s'asseyent ensuite, à même le quai et entament leur repas. Ces crêpes me donneraient presque envie (bon signe) mais ne suis pas convaincue que la friture me soit conseillée, pour l'heure...

Par chance, ce coup-ci, le train n'a quasi pas de retard. Je dois demander à une vieille personne de quitter ma couche, convoitée car en hauteur, garantissant ainsi de pouvoir dormir le lendemain matin. J'ai tendance à être insomniaque dans les transports en commun, sachant à l'avance que la nuit sera difficile. Je vais alors me poser sur les marches de la porte, entre 2 wagons. J'observe la nuit, je vois des phares de camion qui longent les rails. J'entends même parfois de la musique qui jaillit de ce qui semble être nulle part. Puis elle disparaît, comme elle est venue. Je retourne me coucher.
J'ai l'esprit cotonneux, la cadence du train, le bruit régulier des rails chevauchés par les wagons font que j'ai presque l'impression d'entrer en transe. Ce ronron rassurant finalement, cesse. Alors le silence du grand nulle part emplit l'espace. C'est relaxant. Le train est arrêté pour laisser la priorité à un autre. S'en suivra un sifflement qui déchire la nuit mais surtout les oreilles. Les vitres se mettent à trembler et l'on dirait que tout va s'écrouler. Puis le calme revient et le train part enfin, reprenant sa cadence. Après avoir été violemment réveillée, je me rendors, bercée par l'exténuement.

22 mars 2007

Delhi et départ pour les montagnes

Je quitte Varanasi par train de nuit. Le wagon semble dodeliner, comme les indiens le font de la tête pour dire oui. De temps à autre, j'aperçois des lueurs annonçant de la vie dans ce qui semblait pourtant être le néant. Noir, c'est vraiment noir au dehors. L'ambiance de la nuit, si particulière et que j'aime tant, sur la route. L'esprit n'est pas distrait par les 1001 surprises que réservent ce pays, attirant toujours le regard. Juste moi, mes rêveries et la musique. Cela fait du bien de temps en temps...Et là, passe un gamin en haillons, une balayette à la main. Il nettoie le sol. Maintenant, un vendeur de chai hurlant de la voix nasillarde qu'il semble falloir avoir pour faire ce métier : "chaigarrrrrrrrrram". Tout le monde dort pourtant. Il est 3 heures du matin...

J'atteins les alentours de Delhi en fin de matinée, le wagon est calme. La vieille femme en face de moi s'est allongée sur la banquette, recouverte d'une couverture qui cache son superbe sari kaki. Sa fille est cougnée contre la vitre, envoyant des sms ou semblant rêvasser. Un gars se tient debout près de moi, arrêté dans son élan, comme interpellé par ce que je fais, j'écris une lettre ou peut-être est-ce dû au fait que je le fasse de la main gauche, l'impure? Un autre voisin de compartiment est occupé à manger son plateau repas, commandé à un préposé, passé plus tôt, bloc-notes à la main. Il est donc maintenant occupé à manger et a arrêté de me prendre en photo avec son portable. Non pas que cela me dérange trop (vaut mieux pas ici!) mais c'est un peu lourd, à la longue et le manège aura duré une bonne demi heure. D'autres dorment encore, les chanceux.

En gare de Delhi, lorsque nous arrivons enfin, quelques heures de retard derrière nous, c'est le branle-bas de combat ça descend, ça monte, ça transporte un nombre considérable de sacs. Les porteurs, reconnaissables à leur chemise et bandeau rouges, arpentent le wagon à l'affût du client. Une foule en mouvement tente d'atteindre la sortie. Je ne vois que des têtes et des sacs posés sur elles. La passerelle, nous faisant quitter les quais, bouchonne. C'est un mélange d'ethnies, de styles, de castes, de populations. Un patchwork saisissant, comme si toutes les différentes parties de l'Inde étaient représentées là, sur ce bout de pont.

Je rejoins le calme bienfaiteur de l'appart des amis, qui m'accueillent, comme d'habitude avec grande générosité. J'organise mon imminent départ pour les montagnes de l'Himachal Pradesh (cf carte libellé du même nom). J'hésite brièvement entre 2 destinations et pense tout de même aller à Kirganga, au bout de la Parvati valley. Vue sur les montagnes, sources d'eau chaude dans un coin isolé, vie rustique et authentique : Ca devrait le faire.

Il s'agit donc de se munir de chaussettes, les miennes ayant depuis longtemps disparu, des pastilles pour la gorge, du fer pour reprendre des forces après ma prise d'antibiotiques, une couverture que je porterais comme châle, "à la mode d'ici" pour les soirées froides et enfin la réservation de mon ticket de bus pour me rendre dans la vallée de Kullu. Je courate donc en tous sens à Delhi et le jour de mon départ, me levant tard chez Lionel, je trouve encore le moyen d'aller me faire épiler. Me voici fin prête pour quitter le quartier de Paharganj (celui des touristes, bien situé en face de la gare principale). Sac sur le dos, jeans, baskets et toutes mes affaires chaudes packées, je joins un groupe de touristes, prêt à s'en aller prendre le bus. Il nous faudra 3 heures pour quitter la ville, après de nombreuses haltes.

C'est le grand luxe dans ce bus : Il y a des couchettes 2 places au-dessus des sièges. Il faut rallonger de 200 roupies pour y avoir droit. Le calcul est vite fait : entre la possibilité de :
  • ne pas dormir, être courbaturée, ne jamais trouver la bonne position

et

  • ne pas dormir

Je choisis cette dernière.


Je partage ma couche avec un autrichien qui a vécu 20 en Grèce et s'avérera être un peu... too much for me?! Il parle de cosmos, de connections, d'énergie, me vois comme une déesse musicale??!...
Oui... un de ceux-là.
Sur la couche d'à-côté, se trouvent 2 jeunes israéliens. Elle, vient de se tordre la cheville, plutôt embêtant, juste avant d'aller en montagne... Mais pas trop surprenant, étant donné les chaussures qu'elles porte : ces crocks, je crois que c'est le nom, que tous ses compatriotes mettent aussi. Sorte de gros sabots en plastique avec des trous ronds dessus. Elle voyage depuis un moment en Inde mais ne semble pas particulièrement apprécier les indiens. Il y en a plein des comme ça. Ils restent des mois, reviennent encore mais ne supportent pas les locaux?! Ca paraît absurde et pourtant... Pour en finir avec les voisins de couches, l'israélien, lui, vient de la rejoindre. Il a un sourire scotché, content d'être là et trouve absolument tout "Super". Il semble même halluciner lorsque je réclame son propre change au serveur, qui a visiblement occulté de ses priorités ce menu détail.

Je tente de m'endormir, casque sur les oreilles, musique à fond. Il y a Muse, Depeche Mode, Nine Inch Nails, les fidèles et Shankar, Erkan Ogur ou Dayna Kurtz. J'éprouve subitement l'envie d'écouter Célios, de Gotan Projekt que je regrette de ne pas avoir avec moi. Ca aurait bien été avec mes rêveries du moment. Le casque me permet accessoirement de couper la conversation avec mon voisin l'illuminé.

Longtemps après que le soleil se soit couché, nous quitons Delhi, l'immense. Je suis donc sur une couchette au 1er étage, à l'arrière du bus. La route n'est pas de tout repos. Il y a d'énormes trous qui me projettent en l'air. Difficile de s'endormir ainsi... Puis l'envie d'aller aux toilettes me prends et aucun arrêt en vue. Je vais vers le conducteur, accompagnée de l'israélienne à la cheville foulée. Je découvre le spectacle du trafic : Les lumières des phares, des freins arrières, celles des Ganesh, Shiva, Durga ou autres guirlandes illuminées, posés sur le tableau de bord. Ca zigzague, ça coupe la route, ça s'arrête subitement, ça tourne mais le clignotant reste sans vie, ça passe de droite à gauche, un piéton se jette maintenant sur la route... De la pure folie, c'est étourdissant. Je comprends mieux les soubresauts et autres coups de volants qui font balloter notre convoi, outre la route déjà bien défoncée... J'en viens à admirer le chauffeur qui parvient à faire son boulot dans ces conditions, bien qu'il n'ait pas du tout l'air stressé. C'est une des seules fois où j'ai eu peur sur la route en me reconnaissant inconsciente des réels dangers. Et enfin l'arrêt pipi tant attendu. Je détèste ce besoin lorsqu'il est si urgent, entêtant, aliènant qui peut m'étreindre et parfois durer des heures dans ces bus qui ne semblent jamais vouloir s'arrêter. Ces minutes de galères où tout est bon pour se divertir l'esprit, contracter sa vessie et oublier, juste oublier que là, il faudrait vraiment y aller. Pour ce faire, je chantonne, d'une voix crispée. Je croise les jambes bien serrées. J'avale ma salive. Je me force à observer le paysage, écouter attentivement un morceau de musique mais quoi que je fasse l'envie revient. Ce que je détèste le plus donc, c'est d'avoir l'esprit, le corps omnubilés par cette bête envie d'uriner et qui disparaît dès qu'enfin le bus s'arrête et me voit m'élancer, telle une poule sans tête, à la recherche d'un vague abri pour enfin lâcher la pression. Une attente éternelle alors qu'il n'aura fallu que quelques secondes pour se sentir infiniment mieux...

Les heures viennent à passer sans que je ne le remarque. Notre convoi gravit lentement les pentes, la route serpente, l'air est clair, le ciel noir. Je suis entre le sommeil, Sigur Rós et des bouts de route, d'obscurité qui défilent devant mes yeux. J'ai du dormir. Puis il fait jour et frais. On nous réveille pour une pause chai. Bien que fatiguée, ai-je seulement dormi?, je me chausse et en bois, du chai, shot d'énergie, souvent bienfaiteur. Les montagnes se dressent autour de moi. La fumée des chaumières et la rassurante odeur du feu parfument l'air. Les passants sont cachés sous leur couverture, attendant le départ du bus et sautillant sur leur jambes. Il fait froid, quelques vingtaine de degrés en moins qu'à Delhi. Les petits chapeaux, typiques de l'Himachal Pradesh couvrent les chefs. Les femmes portent un foulard noué sur la tête, ainsi que d'épaisses robes, un châle en laine enroulé autour de la taille. Certaines passent, penchées sous le poids des fâgots qu'elles portent sur le dos.

15 mars 2007

En route, finalement, pour Varanasi


Les ghats

Nous quittons donc Kolkata en compagnie de Nadja, fraîchement débarquée de Thaïlande. Chaleureuses retrouvailles!!! Trajet en train de nuit jusqu'à Varanasi, où je dors évidemment mal: Des gens descendant à une station au milieu de la nuit ont allumés la lumière du compartiment et se sont mis à parler, comme en plein jour. Mon sommeil, déjà tout relatif s'en est trouvé éprouvé. C'est ce qui m'a toujours frappé en Inde. Il y a peu de marques de respect comme nous les attendons chez nous, en revanche une tolérance à quasi toute épreuve. Il me semble que nous fonctionnons à l'envers. Respectueux la plupart du temps, nous manquons par contre cruellement de tolérance.
Mais revenons à notre trajet. Heureusement, dois-je dire, le train s'est immobilisé toute la matinée pour cause de panne. Le wagon cessant enfin de cahoter m'aura permis de dormir et récupérer ainsi vaguement de cette nuit. Nous resterons arrêtés au milieu de nulle part, en rase campagne et ce pendant des lustres. Nous arrivons à la ville sainte avec 6 heures de retard. Nous trouvons facilement une guest house, chez une famille, ce que je préfère. Ballades en barque sur le Gange sacré, avec de sublimes vues sur les anciens palais qui bordent les ghats. Ceux-ci sont parcourus de scènes incessantes de vie, de mort, de prières. J'ai souvent l'impression que l'Inde se révèle à moi lorsque je suis à Varanasi.
Ballade en barque au lever du soleil

Comment ne pas aimer malgré la saleté, la merde, le chaos général qui traînent partout? Les marchés sont animés. Les fruits et légumes se vendent à même le sol, posés sur de vagues bâches. Les saddhus aux looks incroyables se mêlent à la foule.


Babaji

Les mendiants et autres estropiés, souvent les mêmes, poursuivent le passant pour un backchisch. Les enfants vendent des cartes postales, les touristes se balladent, photographient, s'émerveillent, prennent des cours de musique. Nous avons eu l'occasion de voir plusieurs concerts, de vraies calures à l'oeuvre, toujours impressionnant. Je retiens surtout le duo de sarod et sitar, accompagné de tablas. Vraie explosion de vie après une entrée en matière toute en douceur, comme d'habitude. Sublime, j'ai ressenti tant d'émotions. Le plus chouette est de voir les musiciens s'éclater, partager, sourire des prouesses de l'autre. Ils vivent la musique.
Il y a quelque chose de magique, d'unique à Varanasi. Une intensité rare. Les hindous viennent ici pour mourir. L'idéal, le passe-droit afin de cesser le cercle infernal des réincarnations, en voyant ses cendres dispersées dans le Gange sacré. Nombreuses sont les cérémonies de crémation. Les flammes n'ont cessé de brûler ici depuis 2000 ans, dit-on...
Il est temps d'allumer des lueurs qui flotteront sur le fleuve, portées par mes prières.


Puja

A Varanasi, nous nous disons au revoir avec Alex. Il rejoint sa soeur et des amies, venues le visiter pour la fin de son voyage. Je reprends donc la route en solo. Etrange les premiers instants, après ces 2 mois passés accompagnée, je suis toutefois contente de me voir seule pour le dernier mois de voyage. Toujours particulier... Une sorte de revisualisation du périple, des réfléxions qu'il aura engendrées. Un retour sur soi avant le débarquement au bercail, autre réalité.

03 mars 2007

Kolkata

Arrivée à Kolkata un jour après Holy, fête hallucinante où tout le monde se jette de la poudre de couleur dessus (souvent rouge ou violette). Nous voyons les restes sur des cheveux multicolores, vaches teintées ou encore trottoirs aux airs psychédéliques. Etonnant et quelque peu décalé après ce mois sur les îles.
Nous rejoignons Sudder street, le quartier où résident les touristes. Bon nombre d'entre eux sont des bénévoles travaillant dans les diverses ONG locales, la plus connue étant celle de Mère Teresa. Je reconnais certains mendiants de l'année passée dont Gopal qui masse toujours les pieds en marmonnant des prières ou cette femme dont le buste a été ébouillanté.
Je prends quartier au même chai shop, évidemment. Cela devient vite le QG. Il fait bon s'y poser à toute heure du jour pour grignoter quelque chose, boire un inexorable chai ou simplement observer l'incessant manège de la rue.




Raffi, Alex et moi au QG


Kolkata étant l'un des 2 ports principaux de débarcation des Andamans, nous retrouvons ici bon nombre de personnes rencontrées sur place. Cela rend le séjour agréable. Nous partons en visite du côté de l'Howgly river, prenons pour ce faire le bac et profitons de la belle journée pour visiter le marché aux fleurs.








La vie à Kolkata se résumera rapidement au repos et à la récupération. En effet, alors que mes plaies aux jambes continuent leur infection, je m'en prends à un bouton facial, qui me sera fatal... Je me réveille au milieu de la 2ème nuit, avec une plaie sur la tronche. Mes ganglions sont enflés et j'ai de la fièvre. Chouette.
Je vais voir un médecin le lendemain. Un bureau, un gars qui brasse des papiers, une étagère derrière lui, pleine de médicaments. Une porte qui s'ouvre et le médecin me reçoit. Il a écouté, ne m'a pas touchée (auscultée) mais a regardé les plaies. Il semblerait que j'aie une infection de la peau à staphylocoques. Soit... Me voilà sous une ribambelle de médics, dont des antibiotiques et je repars, comme je suis venue. Ceci pour la modique somme de 100 roupies (3.-)

Nous étions sensés quitter Kolkata le lendemain de notre arrivée et avons changé nos tickets (1h00 d'attente) afin de profiter un peu plus de la ville. Kolkata, malgré sa taille et les inconvénients inhérents, se trouve être un endroit fort intéressant, où il est agréable de traîner. Nous partirons donc 2 jours plus tard. Comme souvent lorsque je réserve à l'avance, mes plans tombent à l'eau. Il se passe toujours quelques chose, un aléa qui me vois changer de date, de destination. de décision.

Le jour donc où nous nous apprêtons à quitter la cité, Alex s'en va réserver des billets d'avion pour la suite de son voyage. Il est 17h15, nous prévoyons de quitter le quartier pour la gare autour des 18h45. Je n'ai pas pensé à lui préciser que la manoeuvre risque de lui prendre trop de temps. Habituellement, une matinée entière est dédiée à ce genre de "Mission".
Alors que j'attends Alex sur le trottoir, nos sacs descendus, prête à partir, il arrive en retard, sans ticket n'y même un numéro de référence. Il doit retourner à l'agence afin de récupérer ses billets dans 1/2 heure.
C'est à ce moment-là, je ne sais pas pourquoi exactement : Je sais que ça ne le fera pas. Nous ne serons jamais à la gare pour le départ du train, compte tenu de l'heure de pointe et du fait, que rien ne nous assure que dans 1/2 heure, les tickets seront là. Alex reste confiant, force m'est de constater qu'il ne sait pas...
Ce laps de temps passé, Alex revient de l'agence en courant, je suis toujours sur le trottoir, me faisant déjà à l'idée de ne pas partir ce soir et cela n'est pas pour me gêner, je me sens encore un peu faible, en effet.
Le plan maintenant est d'être amenés par le gars de l'agence jusqu'à la gare. Il nous faudra encore au passage récupérer les tickets d'avion qui ne sont, évidemment, pas arrivés entre temps.
Maintenant, c'est sûr, je n'y crois plus. Nous louperons le train.
Là, je dis franchement que nous devrions renoncer et faire les choses au calme. La perspective de courir à travers l'immense gare de Howrah, sac sur le dos, encore à moitié affaiblie par mon infection, après un train qui sera probablement déjà loin, ne me réjouis guère.
Nous pouvons toujours repousser, encore une fois nos tickets, attendre par exemple l'arrivée de Nadja, notre copine de Neil island et partir ensemble jusqu'à Varanasi. Nous sommes mercredi, elle arrive dimanche, pourquoi nous presser...

C'est ce que nous finirons par faire, reprenant notre chambre et habitudes au chai shop dès notre retour downtown...

La magie du voyage, une rencontre extraordinaire à Kalamaki - Part 7 Roadtrip

 To go with the flow... Je prends la route de bon matin et continue de longer la côte qui devient de plus en plus construite en remontant en...

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