18 novembre 2006

La route jusqu'à Manali

Je quitte la vallée de Spiti par une route que je ne pensais pas non plus pouvoir emprunter, pour cause de neige entravant le passage. En effet, il va nous falloir passer un col à quelques 4500 mètres...

Je prends place dans un taxi-jeep que nous partageons à onze voyageurs. Je suis heureusement arrivée tôt le matin (7 heures) pour avoir une place au milieu. Les derniers, se retrouvent à l'arrière et sont plutôt coincés, il faut le dire.
La compagnie est jouasse, la musique bat son plein et les paysages restent sublimes. Il y a quelques champs labourés qui dessinent de beaux motifs. La jeep, cahotante, sur cette piste, longe des parois raides puis croisent des points d'eaux. Des ponts que je pensais hors service, pour cause de dangerosité évidente, se voient pourtant traverser par quelques véhicules et camions brinquebalants.

Il faut en parler des camions en Inde. On les voit partout sur les routes et parfois même sur les rails! En ligne, incomptables. Et dans ces régions montagnardes, ils sont primordiaux, reliant les coins les plus perdus. Ils sont souvent bien chargés et certains, extrêmes, rappellent étrangement la forme de champignons, déambulants, avec leur bâche recouvrant le chargement. Les engins sont colorés, avec des motifs peints sur les rebords, comme une guirlande de fleurs et presque tous arborent à l'arrière, un fier "Horn please" (klaxonnez, svp)...
Comme si les indiens avaient besoin de se le faire rappeler?!?
Et lorsqu'ils klaxonnent, j'ai remarqué qu'il n'y avait aucune agressivité. C'est vraiment et uniquement, LE moyen de se signaler aux autres.




La route monte et l'on aperçoit la neige de très près. Nous parvenons au Kunzam La Pass.




Les cols de l'Himalaya, fortement habités par la population bouddhiste, sont toujours de forts moments à vivre, lorsque je les traverse. Il y a ici 3 Chörtens (photo ci-dessus) avec les objets de cultes habituels, recouverts de drapeaux de prières colorés, qui illuminent l'espace. Ils flottent au vent, claquant d'un léger bruissement et rappelant ainsi la présence des Dieux aux profanes. C'est splendide. Il y a de nombreuses pierres aux prières sculptées, appelées Madi aux alentours.




Tout le monde est silencieux, respectueux. Mes voisins de route s'en vont prier. Ils se prosternent devant l'autel, déposent une offrande, puis tournent autour des gompas, toujours dans le sens des aiguilles d'une montre, avant de se recueillir une dernière fois.

Nous reprenons ensuite la route.

Petit-à-petit, le silence s'installe dans le véhicule. Chacun semble perdu dans ses pensées. Les paysages défilent et ne me lassent pas. Chaque pierre semble être différente, la rivière change d'aspect également et maintenant que nous commençons à descendre, voilà même que la verdure réapparaît.

Nous ferons une pause thali, repas typique d'ici, aussi appelé "meal". Plat servi sur une feuille de bananier (dans le sud) ou sur une assiette en alu avec bord remonté. On mange avec la main droite, toujours (l'autre servant aux tâches impures), le rebord permet donc de stopper la nourriture afin de la mettre en main, doigts en cuillère. On pousse ensuite les aliments en bouche avec le pouce. Le repas se compose de : riz, portions de curry, legumes, dhal (lentilles), pickles (sauce très étrange au goût on ne peut plus étonnant. Est-ce amer, piquant, salé, sweet'n'sour, acide? Tout cela en même temps? L'un après l'autre? Je ne saurais le dire mais on s'y fait avec le temps et je ne m'en passerais maintenant pour plus rien au monde! Il y en a de toutes sortes. J'ai souvent eu celui à la mangue. Je mange donc en sirotant un chai ravigotant et en appréciant la vue, dans un de ces typiques bouibs longeant la route.

Nous arrivons enfin au Rotang Pass, le dernier bout avant de descendre la vallée et d'atteindre Manali. L'endroit est assez drôle. C'est une sorte de station de vacances pour indiens dits Middle ou même Upper class. La jeep se retrouve prise dans un bouchon, étonnant après le traffic à dose homéopathique que j'ai subi les semaines passées. Les taxis, bus touristiques et autres voitures privées (il y en a là plus que je n'en ai vus en presque un mois!), venus de Manali et parqués n'importe où, empêche le traffic de s'écouler. J'en profite pour sortir de la jeep et me dégourdir les jambes. C'est surtout l'occasion d'assister à un cirque inouï! Les gens se posent tous au même endroit : en bas de la pente, à côté de la route. Certains ont pris leurs chaises pliantes, d'autres tentent la photo en allant un peu plus loin, tous portent ces manteaux en fausse fourrure ou une combi de ski datant des années 70, loués en contre-bas, dans une échoppe longeant la route. Et la grande masse reste debout, éparpillée en groupe, en se sirotant des chai, du coca ou boulottant un épi de maïs, des cacahouètes, n'importe quoi d'autre vendu sur le site. Tous piètinent dans une boue brune qui contraste avec les cimes étincelantes, semblant toutes proches pourtant...

Après une petite heure de stagnation, nous voilà reprenant la route alors que le soleil commence à se faire plus doux. La journée aura été longue et je commence à me réjouir à l'idée d'une douche chaude (absente depuis longtemps au programme, ainsi que le lavage des cheveux, qui, bien qu'ils auraient eu l'occasion de se dresser plusieurs fois sur ma tête, compte-tenu des précipices abrupts que j'ai longés, en auraient été bien incapables, étant donné leur état de saleté).

Il me faudra pourtant patienter encore quelques peu car, alors que j'observe les arabesques que tracent les parapentes en vol, voilà que les freins de la jeep, lâchent. Ce qui est, somme toute, embêtant sur une route de montagne descendante...
Le chauffeur semble s'y connaître. Il se met à la tâche alors que les hommes passagers se groupent autour de lui et commentent la situation.
Tous les véhicules croisés au Rotang Pass descendent, comme le soleil. Après une bonne demi-heure d'essai, on finit par me demander si je n'aurais pas un préservatif pour stopper l'écoulement du liquide des freins... Mmmhhhhmmmm... Vous pensez vraiment que cela va tenir???

Après une heure et demie d'attente et de non-solution, je décide d'agir, voyant le flux des voitures roulant pour Manali devenir de plus en plus rare. Je me fais prendre en stop par des punjabis, contents de me dépanner. Je suis confortablement installée dans une énorme voiture de buisnessmen. Ca chante les tubes en vogue, j'imagine sans peine les images du clip avec de belles demoiselles ondoyant des hanches. Ils m'amènent à leur guest house, qui sera à mon goût. Tout irait de toute façon étant donné l'état de fatigue... Et il y a là de l'eau chaude.

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