14 avril 2007
Agonda et Arrambol - derniers jours
Une moto est arrêtée, un jeune indien à son guidon, propose de m'y emmener. Ok. Il prend soin de ne pas foncer sur la route, elle, bien défoncée!
J'atteins Agonda et trouve une super chambre. Un petit jardin y fait face. Il n'y a personne d'autre (touriste) que moi et quelques membres de la famille.
De suite, je m'y sens bien.
Les après-midi sont redoutables, je reste alors sur la petite terrasse attenante à ma chambre et écoute de la musique. Je fais jouer Gershwin en me prélassant.
Je mange tous les jours chez Fatma qui proposent ses fameux thalis : Aujourd'hui, riz, dhal, carottes au beurre, mélange épicé aux carottes, chou fleur, haricots, haricots aux noix de cachou, bout de pommes de terre au cumin. Tout ceci pour 35 roupies : 1.- Je me gave tous les jours. Les fruits sont superbes. L'ananas est juteux, sucré, goûtu; les bananes sont moëlleuses, parfumées, étonnantes; la papaye enfin apporte une touche fleurie, une belle couleur orangée et une texture veloutée.
Je lis un bouquin d'Alexandra David-Neil, lorsqu'elle visite le Tibet clandestinement, à pied et dans les années 20! Sa manière de voyager est inspirante, étonnante. J'ai l'impression de bourlinguer comme si je faisais partie d'un groupe organisé!
Je passe mes matinées à la plage, profitant des rayons avant qu'ils ne deviennent trop forts. Un jour, 2 hommes viennent à moi et déposent à mes côtés 2 étoiles. Ca ressemble à des oursins mais c'est brun et se trouve être un végétal qui a séché. Les 2 hommes s'en vont comme ils sont venus. Je garde les étoiles, j'aimerais les filmer s'en allant au gré du vent.
Le destin en décide autrement car les voilà déguerpissant plus tôt que prévu. Je ne tente pas de les retenir. Je les regarde avancer, par à-coups sur le sable.
Je croise un copain de Patnem qui m'emmène un jour à Capo de Rama, une belle plage plus au nord. Nous y allons en Entfield, ces vieilles motos pétaradantes. Les environs sont magnifiques, les arbres sont en fruits : les mangues pendent par grappes, les noix de cachou sont collectées et les bananes sont belles jaunes.
Je quitte Agonda et rejoint Arrambol, tout au nord de Goa. Il reste une semaine.
Je croise par hasard Alex, avec ses copines, au marché du samedi soir de Baga. Quel cirque! On en a l'habitude ici en Inde mais là c'est celui du blanc, du riche. Il y a des bars à cocktails partout, de la techno criarde et les prix des produits proposés à prix carrément européens. Les gens qui sont sur le marché ont l'air d'être venus en vol charter pour 2 semaines et ne semblent pas tant avoir une idée des prix, claquant à ne plus savoir qu'en faire. Bref, une sorte de retour télescopé dans notre monde avant l'heure...
Avec Alex, nous nous racontons depuis et prévoyons de nous revoir cette semaine encore. Ils loueront une voiture et viendront sur Arrambol. Sinon, j'ai des fringales comme jamais. Depuis que je suis guérie, je suis tellement contente de pouvoir remanger (et surtout reseller comme il faut) que je n'arrête pas : tartelettes au choco, croissant au beurre, brownie et enfin souvlaki au poulet (1ère viande depuis que je suis arrivée), je profite de tout ce que ce marché peut m'offrir.
Demain, je me rendrais à Pernem afin de prendre mon dernier train pour ce voyage.
J'éprouverais plein de sentiments particuliers en regardant défiler ces paysages des tropiques. Je serais sûrement émue à un moment donné. J'aurais des images du voyage plein la tête, surgissantes, puis une boule au ventre.
Je me poserais ensuite le long du du quai, à quelques mètres du poste de gare. Petite batisse rose. Je m'y asseyerais donc en goûtant aux dernières odeurs du sud. Puis le train arrivera dans un sifflement, comme toujours et je prendrais place dans ma couchette du haut. Je commanderais un thali au gars qui s'occupe de ça et finira bien par passer. Puis je tâcherais de m'endormir, sans grande conviction. Dans la nuit, bercée par le cliquetis du train, je serais entourée des odeurs qui sont exaltées par la chaleur de la journée et se relâchent, comme tout le monde, le soir, quand enfin, la fraîcheur reprend place.
Je trouverais difficilement le sommeil et arriverais chiffonnée à Mumbai. L'instinct de survie sera le plus fort et je marcherais jusqu'à l'arrêt de bus. Je monterais dans le n°1, si je me souviens bien et descendrais à Collaba. Je rejoindrais l'Apollo guest house, où m'attendent mon sac et une chambre. Les boys seront encore endormis, une longue journée les attend. Je passerais la journée à faire les derniers achats, les cadeaux et enfin à ranger tout cela dans mes sacs.
Un taxi m'emmènera jusqu'à l'aéroport, où un long trajet me ramènera en Suisse, ponctué d'attentes interminables.
Je lirais Shantaram, énorme pavé d'un homme aimant l'Inde. J'aurais l'impression d'y être encore un peu ainsi.
01 avril 2007
Delhi avant le sud, pour une dernière fois...
Alors que je passe ma dernière nuit sur Delhi, Lionel me propose de rendre visite à 2 de ses amis pakistanais, percussionnistes. Nous débarquons dans un hotel 5 étoiles, bien loin des Shiva lodge et autres Ganesh paying guest house, où j'ai l'habitude de "descendre"... Je me sens tout-à-fait décalée dans cette ambiance surfaite, bien loin de la réalité que j'ai cotoyée ces derniers mois.
Puis je rencontre les musiciens. L'un est immense, il en impose, massif comme il est. Il porte une longue kurta (tunique) et à son cou pendent de gros colliers de perles. Il a les cheveux mi-longs, brillants et qui ondulent. Il a un regard qui respire l'amour. Un problème de surdité l'accompagne mais ne l'empêche absolument pas de jouer à la perfection de son instrument.
Et leur instrument, j'y viens. Ce sont de gros "barils" en bois. Aux extrêmités, là où ils tapent, il n'y a pas de peaux mais du plastique, ca résonne mieux.
Il y a des ficelles de couleurs qui en pendent. Une grande lanière soutient la percussion lorsqu'ils jouent debouts, fiers, sublimes.
Le 2ème comparse est grand aussi, plus fin. Il se dégage d'eux un mélange subtil d'assurance, de grâce et d'élégance naturelles. C'en est troublant.
Ils commencent ensuite à jouer, assis dans leur chambre d'hotel. Il y a là Lionel qui les accompagne au début (du moins) au Saaz. Sandip est là également, un ami de Lionel, musicien électronique de son état, il est marrant, me faisant, étrangement penser à Woody Allen, heureusement pas par son physique... Et enfin Suchet, qui m'a envoyée chez le médecin il y a 3 jours. Il a un peu le rôle, ce soir de l'organisateur : il fait venir des plateaux de fruits, de l'eau et même une assiette de dessert, venue tout droit du buffet, s'il vous plaît, avec mousse au chocolat. Bliss after sooooooooooooo long.
Les tambours se mettent à sonner, à résonner, à emplir la pièce. On entend qu'eux. Des rythmes qui jaillissent, nets, secs, clinquants. Ils enivrent, font que l'on se sent libre, gai, bien. Les regards que les musiciens échangent sont à observer. Ils sont heureux. Ils écoutent. Ce sont des joueurs de dhargas, sortes de prières qui ont lieu dans des mausolées généralement. Ils jouent pour Dieu, leur musique n'est pas un divertissement, comme on a tendance à la vivre chez nous. Cela s'entend, il a quelque chose de miraculeux dans ces rythmes et ces hommes.
Ils sont, vivent, respirent le rythme.
Une onde d'énergie qui m'emplit. Je suis sous le choc.
Puis, on sent bien que le 1er des 2 percussionnistes, le plus grand, souhaiterait aller jouer ailleurs, dehors, là où il pourrait taper vraiment. Ca le démange, il semble ne jamais vouloir s'arrêter. Lionel, Suchet et Sandip se mettent alors à chercher un endroit. Ca devient une de ces scènes typique que je vis ici, en Inde. Chacun y va de son idée, en trouvant celle de son voisin meilleure. Le lieu du concert privé prendra donc quelques temps avant d'être établi et en attendant, notre grand ami en profite pour se changer. Il met une belle kurta pour l'occasion. L'autre continue à jouer, il est dedans.
Ce doit être rigolo de nous voir traverser le hall de l'hôtel : 2 blancs au look douteux, 2 pakistanais immenses transportant leurs énormes instruments à l'épaule et enfin Suchet et Sandip, l'un l'oreille collée à son portable, tel un impresario occupé et l'autre, visiblement gêné dans ses murs : Woody Allen j'vous dis!!!
Nous nous enfilons tous dans l'Ambassador de Lionel et partons en expédition. Nous roulons dans Delhi de nuit. Je n'ai aucune idée de l'heure qu'il est et je m'en fous. J'ai bien conscience de vivre une soirée très particulière.
La lune est quasi pleine. Elle éclaire alors le spot où nous nous dirigions. Un mausolée. Il est d'une forme octogonale. En son milieu, en bas d'escaliers, le lieu de prières, où brûlent des bougies. Les murs, colonnes et autres portes composant l'édifice se dessinent sous la lueur de la lune. Il y a quelques inscriptions en arabe et des toits en terrasse. Nous voyons au loin les lumières orangées de la ville. C'est calme, la rumeur des rues se fait lointaine. Parfait pour nos amis pakistanais.
Ils jouent à présent debouts. Ils tapent fort. C'est incroyable à entendre, à sentir, à voir, à vivre. Je n'en dormirai pas de la nuit.
Je suis invitée quand je veux au Pakistan et n'ai donc pas manqué de leur faire savoir, que justement, je souhaiterais y aller en octobre, à l'occasion de ce grand festival, rassemblant les suffis (dont ils font partie).
Suite à cette soirée, j'aurais reçus plusieurs emails de mes amis de Delhi, me demandant si je sens encore battre les rythmes fous dans mon coeur.
27 mars 2007
Parvati valley - Manikaran
En milieu de matinée, je descends du bus de nuit et prends un autre bus local pour atteindre la Parvati valley. Ma 1ère idée est de me rendre à Khirganga, tout au bout de la route, à environ 3000 mètres d'altitude. J'apprends que ce ne sera pas possible car il y a 1m50 de neige qui recouvre le hameau et a même détruit des dhabas (petite échoppe à chai). Je verrais bien ce que je ferais ensuite. Pour l'heure, je monte dans un bus qui me mène jusqu'à Manikaran, lieu saint avec sources d'eau chaude... C'est déjà ça...
Je passe tout le trajet à roupiller sur la banquette recouverte de molesquine. Je suis totalement groggy lorsque j'arrive à destination. L'autrichien descend aussi. Vue sur ce superbe temple, au toit blanc qui pointe vers le ciel.
Un pont surplombant la Parvati sacrée rejoint les rives. Le village longe la rivière, s'étirant en longueur et se constitue de bicoques en bois et de maisonettes en dur. De petites ruelles, pleines d'échoppes aux breloques, mènent à la place du village, puis au temple. Sur le chemin, 2 saddhus nous arrêtent. L'autrichien leur demande quelque chose en hindi que je ne comprends pas et me retrouve à suivre les saddhus pour boire un chai. Il faut déjà les voir avec leurs dreads énormes, enroulées sur la tête et soutenues par une écharpe. Le regard est direct et défoncé, fumer le shilom étant l'une de leur principale activité, tel Shiva l'eût fait. "Un don des Dieux". Catapultée au chai shop, j'écoute l'autrichien et les saddhus philosopher. A nouveau, je sens mon côté spirituel inexistant et me trouve quelque peu décalée ici. Cela doit être dû à la fatigue.
Le saddhu qui parle le mieux en anglais se met à chanter, pour son Lord Shiva. Je reçois un Mala, collier de prières en perles. Il semblerait que j'aie un bon karma, comme celui d'une toute jeune fille (est-ce que ça veut dire que mon chemin sera long et mes réincarnations nombreuses???), sa fille. Soit. Pas très rassurant puisqu'il répète sans cesse être un homme fou... Certainement... Il détonne un peu.
Je prends enfin une chambre après cette arrivée rocambolesque dans ce nouveau lieu. Je ressors afin d'explorer les environs, le temple d'abord, si plein de vie avec ces belles couleurs qui flottent. De la fumée s'échappe en certains points de la rivière : ce sont les sources d'eau chaude. Ceux qui viennent prier au temple, déposent en même temps dans des pools, un balluchon contenant du riz, cuisant le temps des prières! Ce sont autant de lieux saints. Quel must de cuisiner et manger grâce à l'eau sacrée!
Je continue mon chemin et me pose là où je croise la femme qui tient le chaishop des saddhus. Elle contemple la vallée en fumant un biddi. Les femmes sont plus libérées par les montagnes. Nous parlons, écoutons le silence, relatif, la rivière dévalant non loin. Son rugissement ne parvient toutefois pas à cacher le chant des oiseaux. La Madame part aux morilles. Je ne la suis pas, étant bien trop fatiguée pour ce faire. J'erre un moment dans les rues, soupe et rentre me coucher, il est 7 heures du soir!
Le lendemain matin, je me sens un peu moins décalée, sauf au niveau du look peut-être, mes nouvelles lunettes ayant un petit air venant de la "City". Je me rends au chaishop, la priorité suite au réveil. Je me réchauffe les jambes à côté d'une sorte de wok contenant des cendres, déposées à l'instant par la Madame, qui semble me prendre en sympathie. C'est plus qu'agréable par cette fraîche matinée. Nous discutons le temps d'un biddi. Aujourd'hui, je compte descendre jusqu'à Kasol par le sentier que j'ai découvert hier. Il longe la rivière agréablement, je me croirais presque en Suisse : même fond d'air frais, sapins et pics enneigés.
Un chemin idéal, en pente douce abrité d'arbres aux troncs longs. Ca bourgeonne de partout, des éclats rosés, pourpres ou blancs pour les fleurs. Les feuilles, quand à elles, se disputent le vert le plus éclatant, alors que certaines osent les orangés. C'est de toute beauté, je me sens bien et me dis que j'ai de la chance.
Je fais une pause et me vois suprise par une lignée d'aigles, plânant à 7 mètres au-dessus de ma tête, en file indienne. Ailes déployées, ils ont une probable envergure d'un mètre ou peut-être davantage. Le ventre est blanc, semble doux et s'étire jusqu'au bout de la queue et des ailes, qui s'ourlent enfin de brun. Ce n'est que grâce, aisance et beauté!
Je croise enfin le pont qui me fera rejoindre Kasol.
Là, une masse se déplace jusqu'à moi, à la façon de Gollum et dépose un bout de carton à ses pieds. Vêtue de noir, en pièce raccomodée, le pull pendouille. Les cheveux sont châtains et presque rasés, enfin, on ne sait pas trop. La peau est brunie peut-être par le soleil mais surtout par la crasse. Puis la femme, une américaine, s'en est une, me regarde et me demande de l'argent, 500 roupies, une somme énorme ici. Je veux lui proposer à manger ce qu'elle refuse, elle veut de l'argent et me le répète, ce sont les seules choses qu'elle dit pratiquement. Sympathique. Elle me laisse une étrange sensation lorsque je la quitte. J'essaie d'imaginer sa vie, pourquoi elle en est arrivée là. Je suis troublée dans mes réflexions quelques instants plus tard lorsque la même femme hurle sur un groupe de gens, passant par là (et n'ayant pas voulu non plus lui donner de l'argent?!). C'est triste.
Je découvre Kasol et m'en vais manger dans un restaurant, semblant être the place to be, accueillant le blanc, fumant du charas en contemplant la vue. 3 indiens à l'air inspiré sont assis non loin. Ils font tous faces au panorama, ils le décrivent en anglais, avec leur typique indian accent, qui a le don de m'amuser, m'attendrir. L'un d'eux, le plus excentrique, s'est enroulé un turban autour de la tête et porte des lunettes de soleil "de la ville". Il chante des ragas qui ont, heureusement remplacés les chansons des Beattles (pas les meilleures) et ce serait encore mieux s'il ne chantait pas!
Je pense à la fin de ce voyage, il reste moins d'un mois maintenant, le compte-à-rebours à commencé. Le temps va passer encore plus vite. Les villages situés en amont que je pensais pouvoir visiter restent inatteignables. Je vais donc rester ici encore quelques jours. Dans mon hôtel il y a de l'eau chaude de la source. Une sorte de grande salle de bains constamment embuée, avec un bassin en son milieu, rempli de cette eau. Je ne parviens pas à m'y baigner, trop chaud! Mais quel bien de se rincer ainsi. Je n'ose plus compter depuis la dernière fois où j'ai eu de l'eau chaude à profusion!
Ce matin, avant de partir pour Kasol, je me suis rendue au chaishop. Vous l'aurez compris, beaucoup de choses se passent, se vivent là. J'y croise un enfant saddlhu, dreads longues et enroulées également dans un turban. Il vit avec son guruji, son maître. Il doit avoir 10 ans. Est-ce qu'il fume déjà???
Plus tard dans la journée, au même chaishop, je rencontre un anglais, aux dreads énormes, riant de toutes ces situations loufoques s'enchaînant depuis quelques instants. Il est attablé avec 2 indiens. Le plus vieux des 2, boit un chai, sort tous les biscuits de leur paquet, les pose sur la table, marmonne bizarrement, a l'air fêlé quoi. Je réalise alors subitement que tous les gens que j'ai rencontré jusqu'à présent (du moins ceux fréquentant ce chaishop) ont un air fou. Le 3ème gars assis à leur table n'a pas l'air méchant mais a de grands yeux exhorbités et fixants. Je ne sais pas ce que c'est exactement mais il y a quelque chose ici d'un peu follo : le croisement entre les cousins de la vallée, la fumette, le lieu saint font autant de facteurs pouvant attester de cette observation... Ca ne laisse pas mon esprit serein, si je peux m'exprimer ainsi et c'est loin d'être l'ambiance que je m'étais imaginée pour la fin de ce voyage. J'aurais aimé quelque chose d'un peu moins... torturé en quelque sorte...
J'hésite à aller rejoindre Nadja à Mcleod Ganj. La communauté bouddhiste est fortement implantée là-bas et l'ambiance sera peut-être moins ravagée?! Après une bonne nuit de sommeil, je décide de passer ma dernière journée à Manikaran avant de partir le lendemain matin pour Mcleod. Je suis un peu coupée dans mon élan, j'ai besoin de chaleur et n'aime décidément pas me réveiller en me ruant sur mes fringues et autres couvertures pour tenter d'en trouver, de la chaleur. Il aurait fallu que je me prépare à avoir froid... Il m'aura surprise, la saison est étrange ici aussi, en ayant fortement tardé à venir.
Et voilà qu'il m'arrive un truc bizarre ce matin. J'étais au chaishop, attendant ma commande lorsque je commence à me sentir mal. Je sors, me dirige vers une guest house à la recherche de toilettes, quand ma vue devient progressivement toute blanche, tous contrastes s'estompant inexorablement. Mon ouïe se trouble, j'entends tout au loin. Je finis par ne plus rien voir, titube et m'assieds, au milieu de la place. Je respire calmement puis tout revient gentiment, les couleurs, la rue. Après cette chute de pression, je me rue aux WC et me vide.
Je vais mieux après, continue ma journée et me persuade que c'est décidément une bonne idée de partir d'ici. Je me renseigne pour les bus et le trajet risque de me prendre la journée.
Je passe une nuit terrible, courant régulièrement aux toilettes, avec des crampes au ventre douloureuses. Je suis néanmoins réveillée à 6h et décide de partir coûte que coûte. Je dors ou somnole tout au long du trajet jusqu'à Bhuntar. De là, je prends un autre bus, en direction de Dharamsala (juste en-dessous de Mcleod Ganj), mais c'était juste en direction car après 6h de trajet, où j'ai resomnolé pour la plupart du temps, il m'a fallu prendre un 3ème bus pour 2 autres heures et encore un 4ème ensuite jusqu'à ma destination finale...
Si j'avais su...
Suis arrivée pathétiquement, ai pris une chambre, très mal localisée en bas d'un escalier que je peinerais à gravir les jours suivants pour joindre le village. J'ai dormi pendant 15 heures non-stop. Et là, a commencé la sérieuse chiasse, vous m'excuserez la si peu charmante expression : je pisse du cul.
J'arrive à me mouvoir jusque chez un docteur tibétain, qui m'a senti les pouls en me demandant confirmation concernant mes selles liquides. Il m'a ensuite donné des boulettes brunâtres et infâmes à avaler. Depuis, je tâche de me reposer bien que je continue à me vider. Je tente le jeûne pour que le poison s'en aille et finis par remanger du riz et des carottes en espérant que ça calme le jeu...
Je suis cloitrée (WC à proximité...) dans une chambre sans chauffage qui me glace les os alors que le soleil brille fort au-dehors. Je n'en peux plus, dès que mon corps le permet, je descends la vallée et prends un train pour Delhi. Mon état intestinal m'inquiète un peu. J''espère qu'il est dû à une bactérie attrapée en mangeant et non pas une tournure bizarre suite à mes staphylocoques. Mes plaies sont plus ou moins guéries mais peinent encore à cicatriser complètement.
Je peux à peine parler de Mcleod, puisque je n'ai pas eu la possibilié de quitter ma chambre souvent. Ca grouille de tibétains et de leur artisanat. Les femmes portent des chubas, ces robes se nouant dans le dos. L'ambiance est au buisness semblerait-il, comme partout une fois que l'on y repasse, quelques années plus tard : davantage de shops, de restos et d'hôtels. Les montagnes environnantes me rappellent celles de la Suisse, avec plus d'aigles qui plânent. Les touristes attirés ici sont d'un autre genre que ceux de la Parvati, aussi. En recherche spirituelle, prenant des cours de bouddhisme, langue ou cuisine tibétains, yoga, reiki, j'en passe et des meilleurs.
Après quelques jours dans ma chambre, il me semble aller mieux. Je pars donc pour Delhi. La route me bouscule en tous sens mais mon estomac tient le coup. J'ai l'impression, du moment que je bouge, l'esprit (de survie?) prend le dessus et le corps suit.
J'atteins Pathankot, un de ces trou de l'Inde qui peut avoir un air effrayant. On voit de telles personnages sur les quais des gares parfois... Des vieux à la barbe longue, vêtus de loongis oranges, autour de la taille, du buste, de la tête et un autre encore autour du cou. Ils marchent avec un bâton, ont un point rouge sur le front et des sandales parfois. L'un d'eux s'assied le long des rails, relève ses tissus et se soulage ainsi, accroupi devant tout le monde.
Il y a plusieurs vendeurs ambulants. Ils ont une sorte de carriole et dessus, un wok posé plein d'huile, où frient des mini-crêpes qui se mettent alors à gonfler, pour se revider enfin. Ils servent avec, dans les fameuses petites coupelles faites de feuilles séchées, différentes préparations de légumes ou pois chiches. Les gens s'asseyent ensuite, à même le quai et entament leur repas. Ces crêpes me donneraient presque envie (bon signe) mais ne suis pas convaincue que la friture me soit conseillée, pour l'heure...
Par chance, ce coup-ci, le train n'a quasi pas de retard. Je dois demander à une vieille personne de quitter ma couche, convoitée car en hauteur, garantissant ainsi de pouvoir dormir le lendemain matin. J'ai tendance à être insomniaque dans les transports en commun, sachant à l'avance que la nuit sera difficile. Je vais alors me poser sur les marches de la porte, entre 2 wagons. J'observe la nuit, je vois des phares de camion qui longent les rails. J'entends même parfois de la musique qui jaillit de ce qui semble être nulle part. Puis elle disparaît, comme elle est venue. Je retourne me coucher.
J'ai l'esprit cotonneux, la cadence du train, le bruit régulier des rails chevauchés par les wagons font que j'ai presque l'impression d'entrer en transe. Ce ronron rassurant finalement, cesse. Alors le silence du grand nulle part emplit l'espace. C'est relaxant. Le train est arrêté pour laisser la priorité à un autre. S'en suivra un sifflement qui déchire la nuit mais surtout les oreilles. Les vitres se mettent à trembler et l'on dirait que tout va s'écrouler. Puis le calme revient et le train part enfin, reprenant sa cadence. Après avoir été violemment réveillée, je me rendors, bercée par l'exténuement.
22 mars 2007
Delhi et départ pour les montagnes
J'atteins les alentours de Delhi en fin de matinée, le wagon est calme. La vieille femme en face de moi s'est allongée sur la banquette, recouverte d'une couverture qui cache son superbe sari kaki. Sa fille est cougnée contre la vitre, envoyant des sms ou semblant rêvasser. Un gars se tient debout près de moi, arrêté dans son élan, comme interpellé par ce que je fais, j'écris une lettre ou peut-être est-ce dû au fait que je le fasse de la main gauche, l'impure? Un autre voisin de compartiment est occupé à manger son plateau repas, commandé à un préposé, passé plus tôt, bloc-notes à la main. Il est donc maintenant occupé à manger et a arrêté de me prendre en photo avec son portable. Non pas que cela me dérange trop (vaut mieux pas ici!) mais c'est un peu lourd, à la longue et le manège aura duré une bonne demi heure. D'autres dorment encore, les chanceux.
En gare de Delhi, lorsque nous arrivons enfin, quelques heures de retard derrière nous, c'est le branle-bas de combat ça descend, ça monte, ça transporte un nombre considérable de sacs. Les porteurs, reconnaissables à leur chemise et bandeau rouges, arpentent le wagon à l'affût du client. Une foule en mouvement tente d'atteindre la sortie. Je ne vois que des têtes et des sacs posés sur elles. La passerelle, nous faisant quitter les quais, bouchonne. C'est un mélange d'ethnies, de styles, de castes, de populations. Un patchwork saisissant, comme si toutes les différentes parties de l'Inde étaient représentées là, sur ce bout de pont.
Je rejoins le calme bienfaiteur de l'appart des amis, qui m'accueillent, comme d'habitude avec grande générosité. J'organise mon imminent départ pour les montagnes de l'Himachal Pradesh (cf carte libellé du même nom). J'hésite brièvement entre 2 destinations et pense tout de même aller à Kirganga, au bout de la Parvati valley. Vue sur les montagnes, sources d'eau chaude dans un coin isolé, vie rustique et authentique : Ca devrait le faire.
Il s'agit donc de se munir de chaussettes, les miennes ayant depuis longtemps disparu, des pastilles pour la gorge, du fer pour reprendre des forces après ma prise d'antibiotiques, une couverture que je porterais comme châle, "à la mode d'ici" pour les soirées froides et enfin la réservation de mon ticket de bus pour me rendre dans la vallée de Kullu. Je courate donc en tous sens à Delhi et le jour de mon départ, me levant tard chez Lionel, je trouve encore le moyen d'aller me faire épiler. Me voici fin prête pour quitter le quartier de Paharganj (celui des touristes, bien situé en face de la gare principale). Sac sur le dos, jeans, baskets et toutes mes affaires chaudes packées, je joins un groupe de touristes, prêt à s'en aller prendre le bus. Il nous faudra 3 heures pour quitter la ville, après de nombreuses haltes.
C'est le grand luxe dans ce bus : Il y a des couchettes 2 places au-dessus des sièges. Il faut rallonger de 200 roupies pour y avoir droit. Le calcul est vite fait : entre la possibilité de :
- ne pas dormir, être courbaturée, ne jamais trouver la bonne position
et
- ne pas dormir
Je choisis cette dernière.
Je partage ma couche avec un autrichien qui a vécu 20 en Grèce et s'avérera être un peu... too much for me?! Il parle de cosmos, de connections, d'énergie, me vois comme une déesse musicale??!...
Oui... un de ceux-là.
Sur la couche d'à-côté, se trouvent 2 jeunes israéliens. Elle, vient de se tordre la cheville, plutôt embêtant, juste avant d'aller en montagne... Mais pas trop surprenant, étant donné les chaussures qu'elles porte : ces crocks, je crois que c'est le nom, que tous ses compatriotes mettent aussi. Sorte de gros sabots en plastique avec des trous ronds dessus. Elle voyage depuis un moment en Inde mais ne semble pas particulièrement apprécier les indiens. Il y en a plein des comme ça. Ils restent des mois, reviennent encore mais ne supportent pas les locaux?! Ca paraît absurde et pourtant... Pour en finir avec les voisins de couches, l'israélien, lui, vient de la rejoindre. Il a un sourire scotché, content d'être là et trouve absolument tout "Super". Il semble même halluciner lorsque je réclame son propre change au serveur, qui a visiblement occulté de ses priorités ce menu détail.
Je tente de m'endormir, casque sur les oreilles, musique à fond. Il y a Muse, Depeche Mode, Nine Inch Nails, les fidèles et Shankar, Erkan Ogur ou Dayna Kurtz. J'éprouve subitement l'envie d'écouter Célios, de Gotan Projekt que je regrette de ne pas avoir avec moi. Ca aurait bien été avec mes rêveries du moment. Le casque me permet accessoirement de couper la conversation avec mon voisin l'illuminé.
Longtemps après que le soleil se soit couché, nous quitons Delhi, l'immense. Je suis donc sur une couchette au 1er étage, à l'arrière du bus. La route n'est pas de tout repos. Il y a d'énormes trous qui me projettent en l'air. Difficile de s'endormir ainsi... Puis l'envie d'aller aux toilettes me prends et aucun arrêt en vue. Je vais vers le conducteur, accompagnée de l'israélienne à la cheville foulée. Je découvre le spectacle du trafic : Les lumières des phares, des freins arrières, celles des Ganesh, Shiva, Durga ou autres guirlandes illuminées, posés sur le tableau de bord. Ca zigzague, ça coupe la route, ça s'arrête subitement, ça tourne mais le clignotant reste sans vie, ça passe de droite à gauche, un piéton se jette maintenant sur la route... De la pure folie, c'est étourdissant. Je comprends mieux les soubresauts et autres coups de volants qui font balloter notre convoi, outre la route déjà bien défoncée... J'en viens à admirer le chauffeur qui parvient à faire son boulot dans ces conditions, bien qu'il n'ait pas du tout l'air stressé. C'est une des seules fois où j'ai eu peur sur la route en me reconnaissant inconsciente des réels dangers. Et enfin l'arrêt pipi tant attendu. Je détèste ce besoin lorsqu'il est si urgent, entêtant, aliènant qui peut m'étreindre et parfois durer des heures dans ces bus qui ne semblent jamais vouloir s'arrêter. Ces minutes de galères où tout est bon pour se divertir l'esprit, contracter sa vessie et oublier, juste oublier que là, il faudrait vraiment y aller. Pour ce faire, je chantonne, d'une voix crispée. Je croise les jambes bien serrées. J'avale ma salive. Je me force à observer le paysage, écouter attentivement un morceau de musique mais quoi que je fasse l'envie revient. Ce que je détèste le plus donc, c'est d'avoir l'esprit, le corps omnubilés par cette bête envie d'uriner et qui disparaît dès qu'enfin le bus s'arrête et me voit m'élancer, telle une poule sans tête, à la recherche d'un vague abri pour enfin lâcher la pression. Une attente éternelle alors qu'il n'aura fallu que quelques secondes pour se sentir infiniment mieux...
Les heures viennent à passer sans que je ne le remarque. Notre convoi gravit lentement les pentes, la route serpente, l'air est clair, le ciel noir. Je suis entre le sommeil, Sigur Rós et des bouts de route, d'obscurité qui défilent devant mes yeux. J'ai du dormir. Puis il fait jour et frais. On nous réveille pour une pause chai. Bien que fatiguée, ai-je seulement dormi?, je me chausse et en bois, du chai, shot d'énergie, souvent bienfaiteur. Les montagnes se dressent autour de moi. La fumée des chaumières et la rassurante odeur du feu parfument l'air. Les passants sont cachés sous leur couverture, attendant le départ du bus et sautillant sur leur jambes. Il fait froid, quelques vingtaine de degrés en moins qu'à Delhi. Les petits chapeaux, typiques de l'Himachal Pradesh couvrent les chefs. Les femmes portent un foulard noué sur la tête, ainsi que d'épaisses robes, un châle en laine enroulé autour de la taille. Certaines passent, penchées sous le poids des fâgots qu'elles portent sur le dos.
15 mars 2007
En route, finalement, pour Varanasi
Il est temps d'allumer des lueurs qui flotteront sur le fleuve, portées par mes prières.
03 mars 2007
Kolkata
Nous rejoignons Sudder street, le quartier où résident les touristes. Bon nombre d'entre eux sont des bénévoles travaillant dans les diverses ONG locales, la plus connue étant celle de Mère Teresa. Je reconnais certains mendiants de l'année passée dont Gopal qui masse toujours les pieds en marmonnant des prières ou cette femme dont le buste a été ébouillanté.
Je prends quartier au même chai shop, évidemment. Cela devient vite le QG. Il fait bon s'y poser à toute heure du jour pour grignoter quelque chose, boire un inexorable chai ou simplement observer l'incessant manège de la rue.
Le plan maintenant est d'être amenés par le gars de l'agence jusqu'à la gare. Il nous faudra encore au passage récupérer les tickets d'avion qui ne sont, évidemment, pas arrivés entre temps.
Maintenant, c'est sûr, je n'y crois plus. Nous louperons le train.
28 février 2007
Havelock
Nous dormons sous tente sur des matelas. Quel luxe de commander un chai, arrivant dans les 2 minutes, à tout instant, sans devoir mettre en marche un interminable processus. Choisir ce que l'on veut à manger, sans devoir tenir compte de rythmes communs. Céder à la tentation et acquérir un pot de Nutella qui aggrémentera idéalement les fins de soirée et les pancakes!
Après Long island, Havelock me semble être le paradis!
Les soirées se passent dans l'un des restos-bouibs qui longent la route menant à la plage. Ils se ressemblent tous et proposent la même chose à manger. Puis, l'assemblée, quelques hippies rescapés et autres touristes musicos, entonne des chants que même les vieux locaux joignent en tapant la cadence. Une ambiance bonne enfant où il fait bon être.
Visite d'autres plages comme Elefanta, aux superbes fonds sous-marins, coraux vivants et aux couleurs variées. Les poissons sont nombreux, virevoltant au gré du courant. Après-midis de farniente sur la belle plage n°5.
La campagne est belle, vallonnée, à la végétation luxuriante. De nombreux martins-pêcheurs bleus traînent le long de la route. Ainsi que ces noix de coco, mises à sécher.
Le séjour sur les îles touche à sa fin et la perspective de rejoindre une mégapole, Kolkata paraît excitante (retour à real India) d'un côté et loufoque d'un autre : Quitter ce havre de paix pour se rejeter dans les klaxons, la pollution et l'agitation en tout genre paraît incongru... Un retour à la civilisation et au net, après une absence d'un mois qui m'aura valu de belles remises en question. L'envie de reprendre sérieusement la route se fait certaine. En attendant, dernière vue sur les Andamans, pour ce voyage-ci.
23 février 2007
Long Island
Nous étalons nos affaires, sortons les sacs de couchage et autres hamacs, cherchons du bois, bref, nous préparons cette 1ère soirée "à la belle étoile".
Je me souviens de cette scène, Alex et moi regardant cet épais et noir nuage au large, pensant que si nous avions été en Suisse, il ne manquerait pas "nous tomber dessus". Ricanant à cette idée qui semble bien loin de nous, il était alors difficile d'imaginer qu'une dramatique et efficace pluie allait s'abattre sur nous quelques minutes plus tard. Aucun arbre ou quelque autre abri ne peut nous protéger. La pluie est trop drue. En un rien de temps, toutes nos affaires, bêtement sorties trop tôt, s'en voient trempées. Cela semble surnaturel, spécialement à cette saison. Nous prenons notre mal en patience, que faire d'autre, et commençons à avoir sérieusement froid. Je fais également face à un autre démon intérieur: ma phobie des serpents, qui, comme tout le monde le sait, sortent par temps de pluie. Nous nous trouvons sur une plage, certes, mais néanmoins bordée d'une jungle dense, imposante, sûrement pleine de ces rampantes bêtes... Il n'en sera rien, heureusement, rien. Une fois que la pluie cesse, nous prenons le chemin du retour, affaires sous le bras et bravons la marée montante avant de rejoindre le village. Les indiens ne cachent plus leurs rires en nous voyant défiler en sens inverse, toutes nippes pendouillantes et dégoulinantes.
Très vite le groupe se démantèle, chacun allant à son rythme. Je me retrouve en compagnie de Jez, l'un des 2 anglais (heureusement que l'on s'avèrera être à 2 d'ailleurs!). L'itinéraire que l'on nous a donné était pourtant simple: "Tout droit, puis à gauche en arrivant à la mer".
Cette marche est intense, il fait chaud, on ne sait pas où l'on va et encore moins où sont les autres. Quelque peu flippant, certes, mais quelle autre option que de continuer.
Nous trouvons un endroit pour camper. Il y a déjà un abri pour le feu, il nous faut juste déblayer le sol des feuilles mortes, afin de voir où nous posons les pieds. Chacun implante son hamac, son espace. Les autres du groupes finissent par arriver quelques 2h plus tard... Un peu furax, il est vrai...
Le campement :
La nuit, le ciel est sublime. Il n'y a (bien entendu) pas d'électricité, nous pouvons alors voir des étoiles scintiller par milliers. La voie lactée pointille de sa traînée cotonneuse l'étendue noire. C'est de toute beauté. Sur le hamac, j'isole mon dos avec des couches de loongis car le vent souffle et me refroidit. Puis, au cours des heures, la marée monte jusque sous ma couche. C'est bruyant mais je ne finis par ne plus l'entendre.
Les réveils sont auroraux, la lumière faisant son apparition dès 5 heures du matin. C'est le moment que les vaches, traînant sur la plage, préfèrent, pour tenter de voler à manger. Elles se sont successivement attaquées à un livre, un sac-à-dos (rongés) et carrément toutes les provisions de nos voisins. Un matin, alors que j'étais la seule éveillée, je vois le troupeau, motivé, se diriger vers le campement des voisins, suisses-allemands, brièvement rencontrés sur Neil island (débrouillards comme pas 2 : ont carrément construits un vaisselier et un abat-jour (!!!) pour illuminer toutes les mains des joueurs de poker (oui, les soirées ont repris ici aussi!). En voulant chasser les ruminants donc, j'ai shooté dans un petit tronc poussant sur le chemin, blessant ainsi violemment mon orteil. Je fais une petite parenthèse sur l'état de mes jambes car les conséquences s'en feront sentir pour quelques semaines encore... De plus, il y a sur la plage des petites bêtes appelées sandflies. Minuscules mouches, quasi invisibles à l'oeil inattentif, qui piquent et donnent ensuite furieusement envie de se gratter. Ce qu'il ne faut évidemment pas faire au risque de se voir parer d'une belle infection... Plusieurs d'entre nous seront touchés (les plaies peinant en effet à cicatriser avec les pieds constamment dans le sable, l'eau salée et, disons-le, souffrant d'un manque d'hygiène régulier...). Un des tchèque, nous l'apprendrons plus tard, s'est retrouvé avec des pieds énormes, ressemblant étrangement à ceux d'un élephant, à force d'avoir trop gratté ses plaies...
Nous quittons l'île et nos compagnons, par petits groupes. La cohabitation aura été sympathique et supportable pour ce temps donné. J'ai surtout béni cette compagnie les 1ers soirs, les plus rudes, ceux de pluies. Je nous aurais bien vus, avec l'Alex qui, disons-le, n'est pas non plus un pro du camping, seuls, sous la pluie ardente, dans le noir, aux portes de la jungle, ruminant sur notre sort, si cela se trouve affamés car incapables de faire un feu (pénible quand cela prend 1/2 heure), paranoïant sur toutes les bestioles potentiellement dangereuses que cette forêt doit forcément abriter, recroquevillés sur nous-mêmes, à la recherche d'un brin de chaleur, préférant pour un temps la solitude et le mutisme avant de finalement se hurler dessus, accusant l'autre de tous les maux, comme des frangins le feraient...
Non, c'est bien qu'on ait été accompagnés pour ces épreuves, je ne suis pas sûre, sans cela, que nos nerfs auraient passés la nuit...
Et donc, chacun reprend son chemin. Jez reste au campement jusqu'au prochain bateau, dans quelques jours. Les suédoises et les tchèques s'en retournent à Port Blair alors que le reste d'entre nous allons sur Havelock, la dernière île des Andamans que je visiterais, ce coup-ci...
12 février 2007
Neil Island
Eeeeeeeeeeeeeeh oui, je sais... La nature fait bien les choses parfois... Nous sommes donc au mois de février. Certes, l'hiver n'aura pas été trop rude en Suisse cette année... Mais enfin tout de même... On se sent mieux lorsque les pieds foulent du sable fin comme de la poudre, blanc, presque trop étincelant et longent une eau à la marée contrastante, aux bleux clairs sublimes. Les arbres sont immenses ici, les troncs sont gris argentés, leur feuillage abondant, abritant des oiseaux aux beaux plumages. Nous suivons un rabatteur pour rejoindre la Tango guest house, toujours recommandée par Johav et qui s'avèrera être The Place to Be sur l'île. Nous y ferons de très chouettes rencontres de voyage. Nous avons une mini-hutte pour chambre. Elle est faite de feuilles de bananiers tressées. La porte se trouve être une simple bâche de plastique à en-(ou dé-)rouler. Outre les huttes du même genre, il y a aussi quelques chambres en dur et des hamacs disséminés dans le jardin, sous les arbres, ombrant de manière salvatrice les campeurs.
La vie se fait douce ici et rapidement, chacun prend ses habitudes. Je pars au village à mon réveil, pour y déjeuner des idlis, ces délicieux "moelleux" salés, servis avec du chutney, une sauce faite de noix de coco. Je vais dans un petit bouib sur la place du village pour les déguster. J'y prends mes habitudes... Le gars qui les vend finit fatalement par me demander si je veux un chai et hurle la commande à l'autre bout de la rue. Je rejoins ensuite le dit-chaishop, où j'en sirote encore quelques uns, alors que je regarde la vie se dérouler.
Les journées sont faites de ballades à vélo à la découverte de l'ìle et ses plages. La routine ici se compose essentiellement de beachtennis, bronzettes et trempettes dans ces eaux sublimes.
Nous faisons au sein de la guest house, de belles rencontres avec Yvi et Nadja, notamment, deux soeurs suisses-allemandes, parties sur la route pour une durée indéterminée. Nos nombreuses discussions vont alimenter des pensées qui ne demandent qu'à se réveiller. Reprendre la route sans date de retour, par exemple. La graine a été plantée dans mon esprit et ne cessera de grandir dès lors. Nous rencontrons là aussi tout un groupe voyageant déjà ensemble, se composant de 2 anglais, 2 suédoises et 2 tchèques. Nous nous retrouverons ensemble à camper sauvagement à Long island, mais j'y reviendrais plus tard...
Pour l'heure, nous voici partis en expédition "Snorkelling", plongée avec masque et tuba. Les côtes défilent, la mer est houleuse et un israélien vomira par 7 fois avant de se jeter gaiment à l'eau. J'aurais eu l'occasion de voir passer au raz du sol et à toute allure, une tortue, bénéficiant d'un courant rapide. En tournant la tête, je vois un requin des récifs à pointes noires, s'éloigner d'un coup de queue. J'aperçois encore les traditionnels poissons corails que l'on trouve partout dans ces eaux. Les coraux à proprement parler sont passablement morts malheureusement. Les vives couleurs des poissons animent seules les fonds.
Clive and Jez
Our favourite londonian accent friends
Les soirées sur l'île sont trépidantes : Poker au programme. Il faut le dire, le risque en cas de perte est moins grand lorsque l'on joue des roupies... (100rs = 3.-). Je bluffe et m'en fous plein les poches le temps des premiers soirs. Cela me vaut une réputation qui me précèdera (incroyable!), les nouveaux arrivants sur l'île semblant tous connaître "lasuissessequijoueaupokeretplumetoutlemonde". Ce temps de gloire sera néanmoins bref, chacun s'améliorant au fil du temps, la concurrence deviendra rapidement rude.
Nous festoyons aussi à l'occasion des 20 ans d'une jeune suédoise. Pour ce faire, une sono a été louée au village et des guirlandes mises dans les arbres. Il faut le dire, ce sera pour certains une belle beuverie et pour d'autres, le moment de danser toute la nuit (avant de finir à la table, car qui est gambleur, le reste...)
Puis le jour pointera son nez et ce sera l'occasion de regarder apparaître le soleil, l'oeil un peu rougi et la bouche pâteuse. Le spectacle restera nénamoins superbe. Je finirais par m'endormir sur la plage et me réveiller à 9h, sous une chaleur déjà torride, rude après cette longue nuit... Chacun récupérera à son rythme et pour sûr, la demoiselle se rappelera de ses 20 ans!!!
Nous passons quelques 2 semaines sur cette île, habitée en grand nombre par nos amis les bernard-l'hermite, qui arpentent les plages.
Puis nous organisons notre départ pour Long Island, dont Nadja et Yvi nous ont tant parlé. Ce sera l'étape Robinson Crusoé de ce voyage puisque nous y ferons du camping sauvage. Il s'agit de faire le plein de piles pour les hauts-parleurs de voyage, acquérir un nouveau jeu de cartes et se munir de hamacs qui seront notre couche pour les 10 prochains jours.
28 janvier 2007
Pondicherry et Auroville
Nous allons retrouver Dano, l'ami yogi, qui séjourne à Auroville, cette étrange cité, créée en 1968 par "La Mère", soeur spirituelle de Sri Aurobindo, visionnaire du début du siècle passé. Auroville donc, se veut être un lieu qui n'appartient à personne, interdisant toute religion mais où chacun y résidant, s'engage à devenir meilleur. L'argent n'est pas sensé être un problème mais le reste, comme partout ailleurs.
Cette communauté se veut en constante évolution dans divers domaines et apporte peut-être un plus, ou du moins, tente un essai différent de mode de vie.
Il m'a néanmoins semblé que les humains et leurs préoccupations restent partout pareils et même avec les meilleures volontés qui soient, ne semblent pas être si différents à Auroville.
Enfin, il faut leur laisser les meilleures tartelettes au chocolat (suisse, s'il vous plaît) et les croissants pur beurre que je me suis envoyés!!!
Nous avons loué une vespa pour nous y rendre et cela a été l'occasion de bonnes rigolades. C'est un peu comme être dans un jeu vidéo, où plusieurs obstacles, pour ne pas dire dangers, nous viennent contre. Les motos, voitures, rickshaws, camions et bus composant les principaux acteurs de la route ne cessent de se dépasser, faire irruption sur la chaussée, freiner brusquement pour tourner, sans, bien évidemment avertir du mouvement. Bref, une ballade qui m'a fait me demander si je ne fais pas, parfois, preuve d'inconscience lors de mes voyages... En même temps, il faut bien le dire, cela fait partie des meilleurs moments!
Nous ne restons que quelques jours dans les environs, puis rejoignons Chennai en fin de journée et peinons, étrangement, à trouver de quoi loger près de l'aéroport. Nous finissons dans un hôtel, un peu plus loin sur la route pour une courte nuit. L'avion pour les Andamans part tôt demain matin...
26 janvier 2007
Tirupati
Arrivés à destination, nous cèderons à la tentation, en nous offrant un taxi, plutôt que le bus, au départ incertain. Il y a une faune qui erre entre la gare et le guichet des tickets de bus. Nous négocions le prix du taxi, roulons dans un lieu où le traffic ne semble jamais s'arrêter et visitons plusieurs chambres avant de jeter notre dévolu sur l'une d'entre elles. Elle est charmante, à l'arrière du batiment, donc loin de la route et de son agitation. Alors que nous nous reposons enfin, voilà qu'un loooooooooong sifflement se fait entendre. Il nous laisse cois, jusqu'à ce que nous réalisons que la chambre donne bien à l'arrière, mais sur 6 voies de chemin de fer!!!
Et c'est là que j'ai pris conscience de la longueur des sifflements de locomotives, annonçant les départs et arrivées des nombreux trains, déversant leurs lots quotidiens de pélerins.
Puis, il y a les coiffeurs qui travaillent, assis par terre, leur outil à la main. Ils s'activent en gestes précis, traçant des lignes faisant apparaître le crâne brun, lissé, rasé. Les cheveux tombent, par longues masses chez les femmes, qu'il est déjà si rare de voir aux cheveux courts... Certains enfants pleurent, d'autres restent stoïques.
C'est étonnant tous ces tondus à la ronde, cela n'arrive pas souvent d'en voir autant!
Le site est énorme et reçoit les jours de festival, plus de visiteurs que la Mecque, le Vatican et Jérusalem réunis...
23 janvier 2007
La douceur de Hampi
Nous voyagerons en classe générale, autrement dit, les bancs en bois. Il n'y a plus de place et parvenons à trouver un espace au-dessus des banquettes, sur les portes-bagages. Nous nous asseyons, cougnés comme des sardines, certes, mais le trajet se fait néanmoins dans la bonne humeur. Il faut simplement faire preuve d'une certaine agilité pour se frayer passage afin d'aller au WC par exemple ou fumer une cigarette à la porte, toujours ouverte. Il fait chaud et bon se poser sur les marches, en regardant le paysage défiler. La campagne est verte, en longues étendues. Il y a de nombreux oiseaux qui virevoltent. C'est calme et beau.
Puis, enfin nous parvenons à Hospet. Un rickshaw nous mènera jusqu'au village saint de Hampi.
La vue donne sur les rizières qui sont superbes au coucher du soleil, alors que la lumière devient comme magique, ourlant de doré tous les contours.
Les temples de Hampi réservent aussi des surprises. Il y a là un éléphant, par exemple qui, lorsqu'on lui donne 2 roupies, fait une puja (prière) en bénissant le donneur avec sa trompe. Je n'ai évidemment pas manqué de me faire protéger par la bête (Ganesh n'est pas loin...)
Nous avons gravit les 500 marches qui mènent à l'Hanuman temple (Dieu Singe), avec un saddhu qui vit là, fumant de gros shiloms à longueur de journée. L'escalier pour y parvenir est escarpé. Les singes se balladent dans les arbres aux alentours. Ils sautent de branches en branches, se posent pour manger un fruit glâné au passage ou encore se cherchent les poux. Ils ne sont absolument pas gênés par les aller-et-venues des pélerins et autres amateurs de points de vue. Car celui qui est offert depuis le temple est tout simplement splendide. Les cocotiers se dessinent en mini feux d'artifices, les rizières se voient parées de reflets aux tons changeants et enfin les rochers encadrent le tout comme dans un rêve.
हनुमान तेम्प्ले
Enfin, j'achète ici mon 1er sari, sublime en soie fine, vert émeraude, avec un tombé sur l'épaule en violet, parsemé de bordures dorées. Je n'ai pas pu m'empêcher d'aller me pavaner (à quelle occasion le porterais-je sinon?!). J'avais le sentiment d'être une princesse, avec ces drapés qui ondulent si bien.
Tous les indiens m'ont regardée défiler, un grand sourire aux lèvres et en dodelinant de la tête, comme ils le font ici, si typiquement, me disant que je suis comme une femme indienne ainsi. Il faut dire que Ganga, la maman de la famille (22 ans), m'avait toute préparée : Bindi au front, tresse sur cheveux préalablement huilés et bien sûr l'enfilage du sari, que j'aurais bien été incapable de faire seule. Et voilà ce que cela donne...
J'ai fort sympathisé avec Ganga, mère des 2 garçonnets de la maisonnée. Ils ont le même âge que mes neveux et sont de vrais bouts de chous. Ils nout ont adoptés, venant jouer, dessiner ou se faire consoler à nos côtés. Nous sommes partis en expédition "à la ville" afin de faire des achats, dont le dit-sari. Il fallait nous voir, entassés dans la jeep-taxi, musique bolywoodienne entraînante émanant de la radio et le petit sur mes genoux. Moments magiques.
Nous avons quitté la maisonnée où l'on se sentait vraiment comme chez soi, avec un confort pourtant loin de rappeler la maison (d'une propreté néanmoins irréprochable). Et pourtant cet endroit, la rencontre avec cette famille resteront l'un des points forts de ce voyage. Le sens de l'hospitalité, le souci de bien faire et la générosité de ces gens en ont fait une vraie rencontre de voyage où les larmes se sont confondues aux au revoirs lorsqu'il fût temps de partir.
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